Le chemin du retour : La sagesse durement acquise de Souleymane et Barry

En 2021, Souleymane et son ami Barry quittent Conakry pour l’Europe, mais face à de nombreux défis, ils rentrent en Guinée. Souleymane espère, avec l’aide d’EJM, reconstruire sa vie et inspirer d’autres jeunes.

En 2021, Souleymane Sow, un jeune homme de Conakry, entreprit un voyage depuis son pays d’origine avec l’espoir de garantir un avenir meilleur. À 16 ans, il partit avec une somme empruntée à son père et le coeur plein d’ambition. Il avait vu des amis quitter la Guinée et prospérer dans des terres lointaines, et il croyait que la même fortune l’attendait. Souleymane rêvait d’atteindre l’Europe, où il pourrait étudier et obtenir un emploi stable, lui permettant de soutenir sa famille.

Cependant, le voyage fut semé d’embûches dès le départ. Son premier arrêt fut Bamako, où il épuisait rapidement ses fonds en transport local. Forcé en mode survie, Souleymane prit divers petits boulots, gagnant juste assez pour continuer vers le nord. À Bamako, il rencontra Barry Alseny, un jeune de 17 ans du quartier Kobaya à Conakry, qui avait vendu sa moto pour financer son voyage. Les deux jeunes hommes partageaient une vision et formèrent un lien, décidant de voyager ensemble vers Tombouctou au Mali, puis vers l’Algérie. Malgré leurs ambitions communes, les difficultés ne firent que s’accumuler. À chaque étape, Souleymane fit face à des revers qui érodèrent lentement sa confiance.Au moment où lui et Barry atteignaient la ville frontière algérienne de Borges, ils étaient presque à l’os. Leur arrivée était douce-amère : ils étaient plus proches de l’Europe, mais leurs ressources étaient épuisées.

Souleymane se souvient d’un moment en particulier—après être arrivé en Algérie, il contacta sa famille, leur demandant désespérément d’envoyer l’équivalent de 500 000 GNF (50 CHF) pour qu’il puisse continuer son chemin. Mais la réponse était simple : ils n’avaient pas d’argent. Pour Souleymane, ce moment le frappa profondément; il était si proche, mais son chemin était bloqué. En réfléchissant à cela, il dit : « C’était une grande opportunité perdue—une chance de continuer vers un endroit plus sûr.»
À Borges, Souleymane et Barry avaient du mal à trouver un travail stable, s’appuyant sur de petits emplois inconsistants faisant des tâches ménagères. Après quelques semaines, les jeunes hommes arrivèrent à une réalisation difficile : ils ne pouvaient pas aller plus loin. Ils retournèrent à Tombouctou, où ils trouvèrent un abri temporaire et une petite aide de la Croix-Rouge, leur permettant d’appeler chez eux. Souleymane, cependant, trouva douloureux de se reconnecter avec sa famille, sachant qu’il leur avait laissé tant d’espoir tout en n’ayant que peu à montrer pour cela. « J’avais honte de revenir,» admet-il. « Je ne voulais pas regarder mon père dans les yeux parce que c’était son argent que j’avais pris avant de partir. C’était très difficile pour moi.»

Le voyage de retour vers la Guinée fut aussi éprouvant que le voyage initial. Le bus qu’ils prirent fut attaqué par des voleurs de route, les laissant avec peu à ramener chez eux. Enfin, de retour à Conakry, Souleymane découvrit que, malgré ses efforts et ses rêves, peu de choses avaient changé. « Ce que j’avais laissé derrière moi était le même que ce que j’avais trouvé—le chômage des jeunes partout, la pauvreté comme avant, » remarque-t-il avec une pointe d’amertume. Pour Souleymane, son voyage semblait inachevé, ses objectifs non réalisés, ses espoirs laissés sans réponse.

Aujourd’hui, Souleymane s’accroche à un semblant d’espoir, espérant qu’avec le soutien d’EJM, il pourra reconstruire sa vie et, peut-être, trouver un moyen de sécuriser un avenir stable à Conakry. Pourtant, une partie de lui reste désillusionnée. « Je pensais qu’EJM nous aiderait à trouver des moyens légaux d’aller vers l’Ouest, mais il semble que ce soit autre chose. J’attends de voir où cela pourrait mener. » En attendant, il a une forte conviction d’aider les autres. «Si jamais j’avais les moyens d’aider, j’écouterais les rêves des autres jeunes. Pour ceux qui veulent aller à l’étranger, je les soutiendrais, et pour ceux qui veulent étudier ou travailler localement, je les aiderais aussi.»
Pour Barry, le voyage a également laissé une empreinte durable. Il se souvient vivement de la pression du voyage, en particulier lorsqu’il est tombé malade et a dû faire le choix de faire demi-tour. Il est rentré chez lui désillusionné mais soulagé d’avoir survécu. Malgré ses propres revers, Barry voit de l’espoir dans le fait de rester en Guinée, où il rêve d’ouvrir une petite boutique de vêtements. Ayant vu de près les dangers de la route migratoire, Barry est désormais résolu dans son conseil : «Je ne conseillerais jamais à quiconque de prendre la route que j’ai empruntée. Si j’avais les moyens, j’aiderais les autres à démarrer une entreprise ici plutôt que de dépenser tant d’argent à souffrir sur le chemin.»

À leur manière, Souleymane et Barry sont tous deux rentrés chez eux avec une sagesse acquise à la dure, façonnée par les épreuves qu’ils ont endurées et les rêves qui les ont animés. Leurs histoires reflètent la réalité de milliers de jeunes qui quittent leur foyer à la recherche d’une vie meilleure, pour finalement revenir avec des leçons qui résonnent profondément dans les communautés qu’ils appellent chez eux.